Jurisprudence de la Commission des sanctions : 5 exemples rappelés ici
C’est devenu désormais une habitude, l’AFG a invité le 24 Novembre le cabinet Kramer Levin à commenter la jurisprudence de la commission des sanctions (CS) de l’AMF en matière de gestion d’actifs.
Les enquêtes de l’AMF qui débouchent à une transmission à la CS résultent d’une dénonciation dans environ la moitié des cas. Les recours procéduraux sont de moins en moins efficaces, étant donné que les équipes de l’AMF sont attentives à respecter les droits des mis en cause. La lettre de mission de l’enquête est très générale et vise le respect des obligations professionnelles, même lorsque l’AMF a des idées précises sur les points de contrôle sur lesquels elle souhaite se concentrer.
Après ces rappels, H. de Vauplane et H.Bouchetemble ont commenté des décisions qui apportent des précisions importantes sur la vision de la CS. Extraites de ce florilège, en voici ci-dessous quelques-unes à méditer.
1. La pré-affectation des ordres n’est pas un sujet nouveau. Elle a toutefois donné lieu à deux décisions (4 décembre 2015 et 6 Avril 2016) qui ont mis en évidence (1) l’importance de la traçabilité des opérations conformément à des procédures ciblées sur chaque type de négociation (procédures distinctes et précises pour les ordres passés par une plate-forme, à la voix ou via un « chat Bloomberg », avec indication des supports utilisés pour matérialiser la pré-affectation…) et (2) l’obligation pour le contrôleur qui relève un dysfonctionnement de s’en tenir à la lettre de la réglementation pour la faire appliquer. La CS a retenu comme une circonstance quasi aggravante le fait qu’ayant constaté un délai dans l’affectation un contrôleur ait recommandé de réduire le risque de favoritisme de certains comptes en accélérant l’enregistrement sans exiger une parfaite pré affectation.
2. Exemples de distorsions entre code de commerce et droit financier AMF : il s’agissait dans la décision du 18/7/2016 de sanctionner une absence de procédure comptable dans une SGP qui avait confié sa comptabilité sociale à un expert-comptable. La lettre de mission de ce comptable externe n’a pas pu être retenue comme valant procédure. Comme la délégation, l’externalisation d’une prestation n’exonère pas la SGP de sa responsabilité. Par ailleurs, le Président du CA a été retenu responsable personnellement de l’abus de biens sociaux de son DG, car il était deuxième dirigeant responsable et comme tel impliqué dans la gestion effective, malgré les limites qu’impose le droit des sociétés à un président non DG.
3. Le 25 Novembre 2015, c’est l’absence d’information des porteurs d’un fonds immobilier sur l’intervention d’une société liée dans quelques opérations qui a été condamnée. Il s’agissait de porter à la connaissance des investisseurs l’existence d’un conflit d’intérêt qui n’était pas suffisamment bien maitrisé. Or, la participation de cette société de rénovation immobilière liée était limitée à 20% de l’activité dans le programme d’activité validé par l’AMF, ce qui représentait aux yeux de la SGP une modalité suffisante et validée de gestion du conflit. Mais la procédure de gestion des conflits a été jugée non opérationnelle parce qu’elle a été enfreinte dans quelques occasions.
La CS s’en tient à une approche très formelle d’existence et de respect d’une procédure précise et circonstanciée. En cas de défaut d’application, elle ne s’interroge pas sur les conséquences de l’infraction et ne juge que sur la forme et pas sur la substance. Une vision à l’américaine dont on a longtemps espéré que la justice française saurait se préserver.
4. Externalisation ou délégation ? La décision du 24 mars 2016 dit clairement qu’il y a délégation quand le pouvoir effectif de décision est transféré. Même si l’apparence d’une décision finale par la SGP est maintenue, quand le conseiller transmet des recommandations qui sont systématiquement et immédiatement suivies, il n’y a pas de doute sur la réalité du pouvoir de décision.
La référence de la CS au fait que la SGP avait envisagé dans ses travaux préparatoires de mettre en place une délégation de gestion n’apporte rien et introduit maladroitement un procès d’intention de détournement de procédure.
5. Le repli d’une SGP en difficulté financière dans les locaux d’habitation de son dirigeant principal et la désignation par lui de son fils comme second gérant n’a pas été du goût de l’AMF. La CS a sanctionné cette recherche d’économies en période difficile pour absence de contrat et de paiement de loyer par la SGP à son dirigeant tendant à montrer que la SGP ne disposait pas des moyens nécessaires. Décision du 17 novembre 2016.
(Mis en ligne le 9 décembre 2016)



















































